2019-05-23 00:00:00

Le GNR à nouveau dans la balance de Bercy

Pour financer ses promesses de baisses d’impôts, le Gouvernement remet de couvert avec la « niche fiscale » du GNR.

On s’y attendait, puisque le gouvernement n’avait promis qu’un moratoire sur le sujet. Et, précisément, le sujet est revenu sur la table le 2 avril dernier : le débat sur les « niches fiscales » est relancé, avec un haro annoncé sur la fiscalité du Gazole Non Routier.

Non, le GNR n’est pas une « niche fiscale »…

Le GNR n’a pas la même utilité que le gazole. Utilisé pour des engins de chantiers n’ayant pas vocation à rouler sur route, il alimente des moteurs servant exclusivement, dans notre profession, à réaliser des tâches sur un chantier qui ne pourraient pas être réalisées autrement, et pour lesquelles il n’existe pas à ce jour d’équivalent en motorisation « propre ».
Une niche fiscale résulte d’un choix du contribuable. Ce n’est pas le cas du GNR, qui est un carburant obligatoire.

Le GNR dans le BTP : un « pognon de dingue » pour l’État ?

Bercy comptabilisait 457 niches en 2018, pour un manque à gagner total de 100 milliards d’euros. Le manque à gagner résultant du taux réduit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) sur le GNR est évalué à environ 1 milliard d’euros pour le secteur du BTP (dont 80% pour les seuls TP), soit 1% du total…
A toutes fins utiles, nous rappelons que le secteur du BTP n’est pas le seul à utiliser du GNR. A titre d’exemple, le manque à gagner sur le « rouge » utilisé dans l’agriculture représente, pour ce secteur qui emploie moins de 3% de la population active (contre plus de 7% dans le BTP), un peu plus de 1 milliard d’euros.
C’est la raison pour laquelle, afin d’être cohérent en termes de protection de l’environnement, la modification de la fiscalité du GNR devrait concerner l’ensemble des utilisateurs : agriculteurs, artisans BTP, pêcheurs…

Taxer le GNR : une fausse-bonne idée

Même s’il est tentant pour l’État de taxer le GNR dont les utilisateurs sont captifs, au sens où il n’existe pas d’autres possibilités techniques, les impacts d’une telle mesure seraient plus que néfastes. Financièrement, le coût de la mesure serait forcément reporté sur les clients, ce qui se traduira par une flambée des prix et donc, une chute du marché. Sur un plan écologique, l’effet sera nul, puisqu’il n’existe pas à l’heure actuelle de solution alternative ni d’engins de chantiers, de tracteurs ou d’engins forestiers électriques.

Le GNR sera donc toujours utilisé par les professionnels à moins que l’État ne laisse le temps aux industriels de développer les solutions alternatives innovantes actuellement qui ne sont actuellement disponibles qu’en quantité insuffisantes. On pense ici notamment au bio-méthane et au GTL, un carburant de synthèse qui permet une réduction de la consommation, du bruit, des particules fines, limite l’encrassement des moteurs.

Nous ne lâcherons rien !

La CAPEB et le CNATP réaffirment leurs positions sur le sujet, et notamment :

  • Opter pour une mesure lissée dans un temps assez long pour permettre aux TPE artisanales d’en anticiper et d’en amortir les conséquences ;
  • L’égalité de traitement entre les utilisateurs doit être la norme en cas de modification de la fiscalité.
  • La création d’un groupe de réflexion spécifique sur la transition écologique avec l’ensemble des parties concernées
  • L’engagement de l’État à consacrer les recettes de cette taxation à la transition énergétique du pays.
  • Des dispositions permettant aux entreprises de répercuter cette hausse du GNR dans tous les marchés en cours, qu’une clause de révision ait été ou non prévue.
  • La mise en place un grand plan d’accompagnement des entreprises artisanales pour la transition de leur flotte d’utilitaires, fourgonnettes, camions et/ou engins de chantier, vers des véhicules propres.
  • Le maintien de l’exonération pour tous les équipements et engins de chantier non disponibles aujourd’hui avec d’autre type de motorisation.

Par ailleurs, la CNATP a été reçue sur ce sujet à Matignon le 2 mai dernier, et le Président Liébus, reçu à Bercy, a rappelé fermement à la Secrétaire d’Etat auprès du Ministre, que la CAPEB restait opposée à toutes formes de décisions brutales et non concertées. Il a rappelé que beaucoup d’entreprises ayant déjà investi dans l’achat d’engins ne peuvent se voir imposer de nouvelles dispositions fiscales alors qu’elles ne disposent pas d’alternative immédiates dans la mesure où les constructeurs ne proposent pas d’autres motorisations. Les entreprises seraient donc punies, sans aucune possibilité de se tourner rapidement vers des énergies renouvelables.
Nous poursuivrons dans les semaines qui viennent les actions de lobbying que nous avons entamées immédiatement, notamment avec une enquête auprès des professionnels dont les réponses serviront de base à nos futures actions. Notons d’ores et déjà un certain pessimisme dans les réponses et une grande inquiétude face à la situation de la part de TPE pour lesquelles le poste GNR représente plusieurs (dizaine de) milliers d’euros annuels.

Mobilisons-nous, car il en va de la survie d’un grand nombre d’entreprises à taille humaine !