Micro-absentéisme : un enjeu juridique et organisationnel à maitriser
Dans le secteur du bâtiment et des travaux public (BTP), la régularité de la présence des salariés – qu’ils soient affectés à un chantier ou à un poste administratif – conditionne directement la bonne exécution des projets, la tenue des délais contractuels et la maitrise des coûts. Dans ce contexte, le micro-absentéisme, défini comme la survenance d’absences courtes mais répétées, constitue un facteur de désorganisation non négligeable.
En pratique, il soulève des enjeux tant disciplinaires qu’organisationnels, auxquels l’employeur doit répondre par des mesures encadrées, adaptées et en adéquation avec la nature de son activité.
Une absence de définition normative, mais une portée juridique bien établie
Le micro-absentéisme ne fait l’objet d’aucune reconnaissance textuelle dans le Code du travail ni dans la Convention collective nationale des ouvriers, des ETAM et des cadres du secteur. Il s’agit d’une notion construite par la pratique, désignant une succession d’absences de courte durée, justifiées ou non, mais dont la fréquence ou l’importance nuit au bon fonctionnement de l’entreprise.
Juridiquement, ces absences sont encadrées par plusieurs obligations contractuelles, telles que :
- L’obligation d’exécution de bonne foi du contrat de travail ;
- Le devoir d’assiduité, inhérent à la fonction salariée ;
- Le respect des procédures internes de justification des absences.
A ce titre, le salarié est tenu de justifier toute absence dans un délai de 48 heures à compter de sa survenance. Cette exigence, issue de la jurisprudence et de dispositions conventionnelles, permet à l’employeur d’exercer son contrôle sur la réalité et la véracité des absences. A défaut de justification dans ce délai, l’absence est réputée injustifiée, non rémunérée, et susceptible de faire l’objet d’une mesure disciplinaire pouvant aller – en fonction de la gravité et de la récurrence – jusqu’au licenciement pour cause réelle et sérieuse.
Une pluralité de causes selon les fonctions et les environnements de travail
Les raisons expliquant ces absences soudaines, non prévues et prévisibles peuvent s’expliquer de diverses manières plus ou moins anticipables par l’employeur.
Les ouvriers et encadrants de proximité sont exposés à des conditions de travail pénibles susceptibles d’engendrer des arrêts courts pour troubles physiques mineurs. Les contraintes de transport et d’organisation personnelle accentuent également les risques d’absences inopinées, notamment en cas de grand déplacement ou d’éloignement du domicile.
Les ETAM et cadres, notamment affectés à des fonctions administratives, techniques ou d’encadrement, peuvent quant à eux être confrontés à une surcharge cognitive, un manque de reconnaissance, ou à une désorganisation managériale, facteurs propices à des absences ponctuelles.
Enfin, il n’est pas exclu que certaines absences relèvent d’une utilisation opportuniste du droit à arrêt de travail.
Les moyens d’action de l’employeur
Tout employeur est fondé à exiger, pour toute absence, un justificatif remis dans un délai de 48 heures. Ce document conditionne tant la régularisation de la situation du salarié que le maintien de la rémunération correspondante. En cas de manquement à cette obligation, et sauf circonstances exceptionnelles, l’employeur peut considérer l’absence comme injustifiée et engager une procédure disciplinaire appropriée.
Sans être obligatoire, la tenue d’un entretien de reprise à l’issue de chaque absence, y compris de courte durée, constitue un document pertinent de gestion managériale. Il permet de :
- Rappeler les obligations contractuelles du salarié ;
- Identifier d’éventuelles difficultés personnelles ou professionnelles ;
- Prévenir la répétition des absences.
Pour conclure…
Le micro-absentéisme, s’il demeure juridiquement difficile à appréhender en raison de sa nature fragmentaire, constitue un enjeu réel dans le secteur du BTP, qu’il s’agisse de la présence physique sur les chantiers ou de la continuité administrative en structure sédentaire.
La mise en œuvre de procédures internes claires, le recours encadré aux entretiens de reprise, et l’individualisation des réponses disciplinaires permettent d’assurer une gestion conforme au droit tout en maintenant une relation de travail équilibrée. Dans ce domaine, la constance, le suivi, la traçabilité des absences et la proportionnalité des sanctions sont les conditions de la sécurité juridique de l’employeur et de la prévention des litiges prud’homaux.









