2022-05-11 00:00:00

La Cour de Cassation donne raison à la CAPEB !

Depuis quelques années, les syndicats se déchirent dans le Bâtiment sur la refonte des conventions collectives de la branche.

I. L’échec répété de la renégociation des conventions collectives du Bâtiment

Cela fait maintenant plusieurs années que la renégociation des conventions collectives du Bâtiment est en cours mais n’aboutit pas à cause de tension entre les partenaires sociaux.

Acte 1 : à l’origine des difficultés, la signature, le 7 mars 2018, de deux nouvelles conventions ouvriers censées remplacer les conventions du 8 octobre 1990. Ces nouvelles conventions ont pu s’appliquer normalement aux signataires à partir du 1er juillet 2018 et jusqu’au 26/27 février 2019. En effet lors de la négociation, un incident s’est déroulé avec un membre de la CGT qui n’a pu accéder aux locaux de la FFB où se tenait la négociation, suite à quoi la CGT a obtenu la suspension des 2 conventions.

Acte 2 : Deux nouveaux textes ont alors été rédigés dans la foulée et ouverts à signature. Les 2 nouvelles conventions collectives du 20 mars 2019 devaient normalement entrer en vigueur à compter du 1er mai 2019. Mais la CGT et la CFDT, non signataires de ces textes, ont fait valoir leur droit d’opposition. Ces deux syndicats étant majoritaires, les conventions du 20 mars 2019 ne se sont donc pas appliquées. Les entreprises ont dû revenir aux conventions collectives nationales du 8 octobre 1990.

Acte 3 : Suite à cela les syndicats se sont divisés mettant notamment face à face la FFB, favorable à une convention unique, et la CAPEB qui est pour deux conventions nationales (jusqu’à 10 salariés / 10 salariés et plus). Deux accords ont été signés dans le Bâtiment le 14 mai 2019.

Le premier, signé entre la FFB, FO, CFTC et CGC prévoit la mise en place d'une commission paritaire permanente de négociation et d'interprétation (CPPNI) unique pour tout le secteur du Bâtiment. Ce premier accord a fait l'objet d'une opposition majoritaire des syndicats CFDT, CGT et UNSA et a ainsi été privé d'effet.

Le 2nd, signé entre la CAPEB, CFDT, CGT et UNSA prévoit la mise en place de deux CPPNI dans le même secteur du Bâtiment, l'une pour les entreprises occupant jusqu'à dix salariés, l'autre pour les entreprises occupant plus de dix salariés. La FFB et FO ont demandé l’annulation de cet accord.

L’affaire va jusqu’en cassation.

II. Décision de la Cour de cassation

La Cour de cassation précise que lorsque les partenaires sociaux décident, en vertu du principe de la liberté contractuelle, de procéder à la fusion de plusieurs branches professionnelles existantes, doivent être invitées à cette négociation, toutes les organisations syndicales représentatives dans une ou plusieurs des branches professionnelles préexistantes à la fusion.

Le Bâtiment avant fusion comporte 4 branches et l’UNSA est représentative dans l’une (ouvriers – de 10). Elle a donc vocation à participer à la négociation.

La Cour de cassation souligne aussi que la CGT et la CFDT sont majoritaires dans le secteur du Bâtiment ; l’accord du 14 mai 2019, dont le périmètre recouvre l'ensemble du secteur du Bâtiment est donc valide.

Dès lors le choix d'instaurer deux commissions paritaires permanentes pour la négociation de deux conventions collectives relevait de la liberté contractuelle.

La FFB et FO ont donc été déboutés.

Cette décision est une victoire très importante pour la CAPEB qui peut ainsi asseoir ses positions politiques sur des décisions de justice très claires.

Cet arrêt pourrait donc peser dans la dizaine d’autres procédures que la FFB a engagées contre la CAPEB et notamment contre les accords sur l’apprentissage et sur les conventions collectives nationales du bâtiment du 14 décembre 2020.

III. Et maintenant ?

Au-delà de cette affaire, c'est surtout sur l’avenir des CCN du Bâtiment qu’on s’interroge. Le 27 janvier 2021 la CAPEB avait élaboré, avec les partenaires sociaux majoritaires (CFDT, CGT et UNSA) deux conventions collectives nationales :

- une convention collective nationale des entreprises occupant jusqu’à 10 salariés (ouvriers, ETAM et cadres) ;

- et une convention collective nationale des entreprises occupant plus de 10 salariés (ouvriers, ETAM et cadres).

L’extension de ces deux conventions a été demandée.

Mais la FFB avait fait valoir son droit d’opposition.

En fin d’année, le poids des organisations professionnelles d'employeurs reconnues représentatives s’est inversé et la CAPEB est repassée devant la FFB (50,80 %), ce qui lui octroie à elle un droit d’opposition.

Les anciennes conventions collectives sont pour l’instant toujours applicables mais les choses ne devraient pas tarder à rebouger…