Projet de loi SAPIN 2 : l'UPA, la CAPEB et la CNATP s'y opposent fermement !
Dans la perspective de l’examen du texte qui viendra en séance publique à l’Assemblée Nationale début juin, l’UPA, dont la CAPEB, entame une forte campagne de mobilisation auprès des élus et la presse à partir du 27 mai.
Dans l‘Aube, la CAPEB a d’ores et déjà contacté les députés pour leur communiquer des propositions d’amendements qui traitent notamment de la question des qualifications
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### 1. Les qualifications professionnelles
Cette loi vise à remettre en cause les obligations de qualifications professionnelles applicables aux activités artisanales. Ces qualifications professionnelles sont déterminées actuellement en fonction du risque pour la santé et la sécurité des personnes (consommateurs comme professionnels) et en fonction de la complexité des métiers. La réforme proposée est préjudiciable tant pour les activités artisanales et que pour les consommateurs.
Cet article suscite une vive inquiétude unanimement partagée par l’ensemble du monde artisanal.
En effet ce projet intervient alors que la « loi Pinel » relative à l’artisanat, au commerce, et TPE , du 18 Juin 2014 avait permis de trouver un équilibre globalement satisfaisant sur ce dispositif.
Par ailleurs, force est de constater que le projet de loi ne retiendrait plus la complexité des métiers et ce, alors même que les motivations du législateur de 1996 restent plus que jamais d’actualité __: « l’évolution des techniques et l'ouverture du marché à des composants de plus en plus diversifiés et sophistiqués renforcent les risques inhérents à certaines prestations, réparations ou fabrications ».__
Au-delà de la santé et de la sécurité du consommateur et des professionnels, il apparaît que la complexité des métiers, notamment dans le secteur du bâtiment s’est accrue (le nombre de normes techniques ne cesse d'augmenter, pour ne citer que cet aspect des activités du secteur de l'artisanat du bâtiment).
Les professionnels rappellent que le programme FEEBAT (Formation aux Économies d'Énergie pour les entreprises et artisans du Bâtiment) soutenu par les pouvoirs publics, a conduit près de 160 000 professionnels à se former en vue d’obtenir une qualification RGE (Reconnu Garant de l’environnement) désormais exigée pour pouvoir prétendre au CITE (Crédit d’impôt Transition énergétique)
Egalement préoccupant, cet article n’envisage plus l’avis des professionnels concernés (Organisations Professionnelles, APCMA ..) pour la rédaction du décret d’application : quel message le législateur entend-il ainsi faire passer aux entreprises ? Ne sont-elles pas les plus à même de connaître les risques et la complexité de leurs métiers ?
Dans le secteur du Bâtiment les modifications envisagées pour les qualifications professionnelles ne sont pas sans effet sur la sinistralité du secteur.
Pour les assureurs, les qualifications et l’expérience constituent de précieux critères d’appréciation des risques. Si ces critères disparaissent, sur quoi pourront se fonder les assureurs pour délivrer leurs garanties ?
Enfin, cette loi introduit la possibilité de scinder les métiers entre une partie relevant de la qualification professionnelle et une autre partie n’en relevant pas. Or les métiers de maçon, de peintre, de charpentier, de plombier, notamment, dans le secteur du bâtiment__, ne sont pas « scindables ».__
Il convient également de rappeler que le niveau de qualification exigé pour exercer une activité ou en contrôler l’exercice reste modeste : un diplôme de type CAP (parfois BEP) ou trois années d’expérience acquises.
De plus le Conseil Constitutionnel dans sa décision QPC du 24 juin 2011 a écarté les griefs d’inconstitutionnalité de l’article 16 de la loi du 5 juillet 1996 et a précisé à cette occasion que les mesures de qualification ne sont manifestement pas déséquilibrées entre le respect de la liberté d’entreprendre et la protection de la santé.
Si l’objectif du Gouvernement est de favoriser le développement de l’emploi il serait plus judicieux et plus efficace de mieux valoriser le champ des services à la personne, en recourant pour les petits travaux du Bâtiment, au statut existant « hommes toutes mains et bricolage ».
### 2. Doublement des seuils envisagés pour les micro –entreprises
Cette loi remet en cause les dispositions de la loi du 18 Juin 2014 dite « Loi Pinel » relative à l’artisanat, au Commerce et TPE, qui porte, notamment, sur le régime fiscal et social de la micro-entreprise .
En effet la présente loi prévoit le doublement du seuil sur deux années au lieu d’une seule, permettant de bénéficier de la franchise de TVA (65 800 € au lieu de 34 900 € actuellement en prestations de services et 164 400 € au lieu de 90 300 € , actuellement, en ventes)
Cette disposition accorde donc un avantage fiscal important aux micro-entreprises, au détriment des entreprises artisanales et des TPE, qui ne peuvent bénéficier de ce régime, ce qui contribue à accroitre une distorsion de concurrence entre entreprises .
De plus, les dispositions envisagées dans la présente loi entraineront une perte de rentrées fiscales (perte de TVA notamment) non négligeable pour les finances publiques et conduiront également à une perte importante de cotisations pour le RSI .
Il apparait évident que le relèvement des seuils sera surtout un effet d’aubaine pour les entreprises dont les charges sont les plus faibles. En effet celles-ci auraient tout intérêt à ne pas déclarer leurs charges réelles et à basculer dans le régime de la micro-entreprise.
Il est à regretter que l’étude d’impact annexée au présent projet de loi n’apporte aucune précision ni information sur le coût du dispositif pour les Finances Publiques.
Cette lacune ne permet donc pas d’apprécier réellement le coût de ces mesures tant sur le plan du régime fiscal que sur le plan des régimes sociaux.
Pourtant, une étude réalisée par les services du Ministère des Finances sur les dispositions du projet dit « NOé » envisageant un triplement des seuils, avait évalué à 156 M€ le coût de la mesure pour les finances sociales, (hors impact de la TVA) et ceci sans tenir compte d’un éventuel transfert du statut de salarié vers le régime du micro-entrepreneur.
Au surplus, il doit être souligné l’avis du Conseil d’Etat sur ce projet de loi qui précise que «les dispositions envisagées, notamment le relèvement des plafonds de Chiffre d’Affaires constitue une mesure dérogatoire qui requiert une décision d’autorisation préalable du Conseil Européen statuant à l’unanimité, et quand bien même les relèvements précédents de ces plafonds n’auraient pas été précédés d’une telle décision, ces dispositions ne peuvent entrer en vigueur que postérieurement à une décision du Conseil».
Par cet avis le Conseil d’Etat semble indiquer que les seuils actuels de franchise n’aient pas reçu l’autorisation du Conseil européen.
### 3. Le Stage Préalable à l’Installation (SPI)
Cette loi vise à modifier les règles applicables au stage de préparation à l'installation dénommé SPI. Le SPI doit être suivi par les futurs chefs d’entreprise qui s'inscrivent au répertoire des métiers. Des dispenses sont prévues en faveur de certains futurs chefs d’entreprise au regard de leur formation.
Or la formulation proposée dans la présente loi n’est pas satisfaisante, car le « préalable » du stage à l’installation n’est absolument pas assuré ni conforté. Ce constat est dressé sans ambiguïté par le Conseil d’Etat lui-même dans l’avis qu’il a rendu sur le présent texte dans lequel il précise :
« Le projet de loi vise à aménager le stage de préparation à l’installation des artisans, prévu à l’article 2 de la loi n° 82-1091 du 23 décembre 1982 relative à la formation professionnelle des artisans, lequel actuellement est un préalable à l’immatriculation au répertoire des métiers, pour le transformer en un stage postérieur à cette immatriculation.
Le Conseil d’Etat n’a pu retenir cette disposition, au demeurant insuffisamment justifiée par l’étude d’impact, car il a estimé qu’en créant une obligation de stage non assortie de sanction, la sécurité juridique qui doit entourer les conditions d’accès à la qualification d’artisan n’était pas correctement assurée. »
La loi « Pinel » du 18 Juin 2014 a supprimé la dispense de réalisation du SPI initialement prévue au profit des auto-entrepreneurs.
La difficulté du « métier » de chef d’entreprise et la nécessité de disposer d’une formation de base pour sécuriser et viabiliser son projet sont à l’origine de la mise en place du SPI. L’objectif du SPI est de favoriser la pérennité des entreprises en création/reprise, en accompagnant les créateurs afin de :
— préparer le projet de création/reprise d’entreprise artisanale,
— appréhender de façon concrète les missions et responsabilités du dirigeant d’entreprise artisanale.
Le réseau consulaire a engagé des mesures pour faire évoluer les conditions dans lesquelles les porteurs de projets qui souhaitent s’immatriculer au répertoire des métiers doivent bénéficier d’une formation préalable et d’un accompagnement qui correspondent à leurs besoins et au rythme de création de leur entreprise ou de leur activité.
Le réseau des Chambres de métier et de l’artisanat (CMA) dispose aujourd’hui de contenus et d’objectifs stabilisés, pour un déploiement homogène qui a débuté début 2016. L’approche modulaire permettra une meilleure individualisation des parcours.
Les CMA pourront ouvrir leur offre aux personnes qui ne sont pas nécessairement de leur ressort géographique, ce qui permettra de raccourcir les délais pour entrer dans le dispositif. L’homogénéité dans l’organisation s’accompagne d’un strict respect de la tarification, prévue par la réglementation.
Afin de ne pas freiner l’entreprenariat, il apparait que la réalisation du SPI doit cependant être organisée dans un délai de 60 jours, le délai de 30 jours étant notoirement insuffisant.
Enfin il est nécessaire de clarifier les conséquences du défaut d’organisation du SPI dans ce délai raison pour laquelle il est proposé de préciser que dans cette hypothèse l’immatriculation du futur chef d’entreprise ne pourra lui être refusée ou être différée.
Les réactions de Patrick LIEBUS, le Président de la CAPEB :
« Avec le projet Sapin 2, soit on travaillera sans assurance, soit on travaillera sans qualification, soit les deux à la fois ! »
« C’est surtout le consommateur qui va y perdre car le projet Sapin va créer un turn over incessant des entreprises»
« Ce projet de loi cumule à lui seul tous les inconvénients : disparition d’une entreprise artisanale classique, multiplication des microentreprises, recours systématisé au travail low cost, pertes de recettes fiscales doublée









